Marie-Aline Méliyi : « l’actualité politique est une réelle envie des téléspectateurs »
Pour célébrer le premier anniversaire de diffusion de LCI en gratuit, Fréquence Médias, l’émission médias de Germaine – la radio des étudiants de Sciences Po – avec NEWSROOM, vous propose de découvrir une figure de l’antenne de la chaîne et de revenir avec elle sur l’actualité et d’autres acteurs de la chaîne d’information. Marie-Aline Méliyi, co-présentatrice de « LCI Midi« , a accepté de se prêter à l’exercice de l’interview.
M. Martinez : Bonjour et bienvenue, Marie-Aline Méliyi.
Marie-Aline Méliyi : Bonjour Maxime, merci de m’avoir invitée.
M. Martinez : Merci d’être venue. Diplômée de l’Ecole de journalisme de Sciences Po en 2007 – où nous sommes (ndlr : Fréquence Médias est l’émission de la webradio des étudiants de Sciences Po), vous êtes arrivée à LCI en 2009, et depuis 2015 vous êtes en duo avec Philippe Ballard, d’abord à la présentation de LCI Soir, et depuis la rentrée de septembre 2016 de midi à 15 heures pour « LCI Midi« . LCI est passée sur la TNT gratuite depuis le 4 avril 2016. Depuis, elle est devenue 2ème chaîne info de France, devant CNEWS (0,6% d’audience) et BFMTV (2,9% de part d’audience), avec 0,7% de part d’audience. Focus sur le changement du monde des chaînes infos depuis un an. Tout d’abord, qu’est-ce qui a changé sur LCI depuis le passage au gratuit ?
M-A. Méliyi : Déjà, la visibilité, grâce à la force de travail, l’envie, le sérieux des journalistes de la chaîne, que ce soit à l’antenne ou derrière la caméra, n’a absolument pas changé, mais il est vrai que là, on a enfin la possibilité de pouvoir parler au plus grand nombre. Voilà ce qui a changé. Il y a également eu des nouveaux visages, des « stars de l’info », qui sont arrivés, comme Yves Calvi, ou François-Xavier Ménage (à la matinale de LCI). Concernant Yves Calvi, on s’en doutait, les résultats sont ceux espérés, à savoir qu’il représente une locomotive pour la chaîne, entre 18h et 20h, son émission réunit entre 300 000 et 400 000 téléspectateurs, soit un bond d’audience énorme. Et à partir du moment que les téléspectateurs regardent une émission sur LCI, le matin, le soir, ou encore dans « LCI Midi », que je présente avec Philippe Ballard, ils ont envie de découvrir la chaîne, et reviendront à un autre horaire de la journée, aussi bien en semaine qu’en week-end. C’est donc un bonus pour nous.
M. Martinez : Il est bon de rappeler également que LCI s’offre même le luxe de parfois dépasser BFMTV sur la tranche horaire d’Yves Calvi.
Un autre point à souligner : Yves Calvi, Amandine Bégot (ex-iTELE), qui est revenue, ce sont tous des visages que LCI a formé, et qui sont revenus à la « maison LCI ».
M-A. Méliyi : Oui, concernant Amandine Bégot, c’est un « bébé » du groupe TF1/LCI, François-Xavier Ménage de BFMTV, et pour Yves Calvi, c’est aussi un retour aux sources (ndlr : il fut déjà présent sur LCI entre 1994 et 1996). Et quand je lui ai demandé de la raison pour laquelle il avait décidé de prendre des risques et lâcher son émission quotidienne sur France 5, il m’a répondu qu’il avait envie de tenter une nouvelle aventure avec Jérôme Bellay, qui revient aussi -il a été producteur à LCI, Franceinfo:, a lancé l’émission « C dans l’air » et « 24 heures en question », présentée par Yves Calvi. Je pense que quand on est aussi ancré dans le salon des téléspectateurs, qui ne se limite plus à la télévision, mais avec internet, le mobile, l’ordinateur, on peut se permettre de tenter de nouvelle aventures
M. Martinez : LCI, en vue de l’élection présidentielle, est devenue en journée une antenne 100% politique. Capitaliser sur l’actualité de la journée pour relancer la chaîne sur le gratuit, c’est l’objectif annoncé ?
M-A. Méliyi : Oui, et puis l’actualité politique correspond à l’actualité, sans compter qu’il y a aussi une envie des téléspectateurs. Cela peut paraître paradoxal, compte tenudu taux d’abstention sur lequel on se focalise tous, et qui pourrait être assez important pour cette élection présidentielle, autour de 28% ou 32%, alors qu’en vérité, il y a une appétence des citoyens français pour le débat, on l’a bien vu avec le débat du 20 mars sur TF1 et LCI, puis le second réalisé par nos confrères de BFMTV et CNEWS. Il y a ainsi des millions de téléspectateurs qui souhaitaient entendre parler de projets, d’idées, et qui avaient envie de confrontations de points de vue, qui avaient envie d’analyse. C’est donc notre travail de journaliste que de répondre à ce travail de décryptage, avec de plus en plus d’émissions politiques et des débats, des durées que notre grille permet beaucoup plus de réaliser à tout moment de la journée que toute autre chaîne, afin de pouvoir décrypter, débattre, sur tous les sujets.
M. Martinez : Ne s’agit-il pas là-aussi du format original de LCI, qui fut la première chaîne info créée en 1994, d’être beaucoup plus « talk » que BFMTV ?
M-A. Méliyi : C’est vrai, BFMTV a fait le choix du hard-news, qui était un modèle très spécifique, avec une identité qui lui correspond. Et comme vous l’avez rappelé, LCI est historiquement une chaîne de débat, de décryptage, ainsi que des « talks », tout en respectant les codes d’une chaînes d’info en continu : journaux à l’heure, sauf pour Yves Calvi, qui pendant deux heures de débat et une grande interview à 19h30, cassent les codes des chaînes info.
M. Martinez : Sans compter le sacro-saint bandeau défilant (le ticker), qui se permet de disparaître pendant les courses hippiques et l’émission d’Yves Calvi.
Elise Da Silva : Serez-vous toujours à la rentrée à « LCI Midi », avec Philippe Ballard ?
M-A. Méliyi : Je l’espère, en tout cas, la direction est pour l’heure plutôt contente de l’audience, avec 65 000 téléspectateurs au 1/4 d’heure moyen, soit dans la moyenne de la chaîne. Je crois même qu’on est devant CNEWS (rires).
On a la confiance, rien n’est gagné, aucun présentateur n’est propriétaire de sa tranche horaire. Je suis donc prête à bouger si on me le demande.
Maxime Martinez : Comme ce fut le cas à la rentrée. Ce duo, que vous animez avec Philippe Ballard, il fonctionne bien ? On a le sentiment d’avoir à faire à un duo qui fonctionne du tonnerre…
M-A. Méliyi : Avec Philippe Ballard, ça a été une évidence à l’antenne, et comme vous l’avez rappelé, il y a deux ans, on n’était pas ensemble. C’est un duo qui a été créé pour refondre la tranche LCI Soir (présentée par Damien Givelet et Katherine Cooley), pour laquelle la direction de LCI voulait tenter de lancer de nouveaux duos. On m’a donc placée avec Philippe Ballard, alors que jusqu’à présent je ne faisais que des remplacements en tant que joker, sans avoir eu de réelle tranche en tant que titulaire. Dans ce cas-là, il fallait partager l’antenne avec quelqu’un. Moi, j’étais très excitée, tout en me demandant si Philippe Ballard, qui a beaucoup d’expérience, aurait envie de faire duo avec moi, et dès le premier jour, il y a eu une alchimie qui ne s’explique pas, compte tenu de nos parcours très différents. Je pense qu’il ne m’en voudra pas si je dit qu’il a plus d’expérience que moi (rires), et pourtant ça a fonctionné. Je pense que c’est quelqu’un qui est tout le temps « cool », de bonne humeur, quelqu’un de passionné. Je pense que c’est une chance que d’avoir un partenaire qui tous les jours a la pêche, a une envie, et qui vit de sa passion au fil des années, tout comme moi, ce qui donne un super duo à l’antenne.
M. Martinez : Il y a des duos, qui ne se connaissaient pas avant, et qui se révèlent, par exemple, le duo Léa Salamé – Marc Fauvelle sur iTELE il y a quelques années… Un duo dans la case du 17/20 qui avait très bien fonctionné. Comment expliquez-vous cette alchimie qui peut se créer comme ça entre deux personnes pour présenter l’information ? L’information à deux, c’est mieux ?
M-A. Méliyi : Oui, d’ailleurs Léa Salamé et Marc Fauvelle sont devenus amis par la suite. Concernant l’alchimie en plateau, je pense que ça ne s’explique pas, je pense que l’info, c’est aussi, permettez-moi le parallèle, comme en amour. On rencontre quelqu’un, le courant passe, sans savoir pourquoi. Dans mon cas c’est pareil, on est très différents, très complémentaires, il y a aussi beaucoup de respect de l’autre, beaucoup d’écoute. Moi, il y a deux ans, en commençant avec Philippe Ballard, j’étais aussi soucieuse d’apprendre, de voir comment il fonctionnait, car c’est quelqu’un de très actif, et qu’il faut être très souple au sein d’une chaîne info en continu. Il faut accepter, par exemple, que l’on parte sur un journal, et qu’un événement vienne bouleverser l’ensemble. Cela implique de ne pas vouloir tout maîtriser, et de réagir en se basant sur les connaissances de culture générale, sur les lectures des journaux, l’écoute des radios, des autres chaînes de télévision… Il faut être curieux dans ce métier.
M. Martinez : Vous parliez de Thierry Thuillier qui est arrivée à la tête de LCI à la rentrée dernière. Un patron charismatique, passé par la direction de France 2, iTELE, etc… Comment se passe la vie à LCI avec ce nouveau directeur de l’information ?
M-A. Méliyi : Thierry Thuillier a été mon professeur de télévision à l’école de journalisme de Sciences Po il y a près de 10 ans. C’était un professeur à l’écoute, disponible, qui faisait des remarques jamais blessantes, et c’est désormais un patron charismatique, et qui a un cerveau pour construire une grille, pour diriger une chaîne de télévision, il est respecté, disponible, c’est un travailleur, un passionné, présent tôt le matin au bureau, jusque tard le soir. Il regarde tout le temps la chaîne, a tout le temps des idées. Je suis impressionnée par sa capacité de pouvoir faire évoluer la grille, et même de façon très précise. Par exemple, dans LCI Midi, nous avons un nouveau rendez-vous depuis le 10 avril qui s’appelle « Carte Blanche » (avec Hélène Lecomte, photo ci-contre), un rendez-vous culturel, un peu différent, qui se démarque des JT traditionnels des grandes chaînes, pour lesquels certains téléspectateurs seraient tenter de zapper entre 13h et 13h30. Et cette contre-programmation a fonctionné avec ce rendez-vous décalé, avec des audiences en hausse.
M. Martinez : La contre-programmation, la patte Thierry Thuillier, qui avait déjà instauré un « 20h foot » avec succès sur iTELE en 2010 lorsqu’il en était le directeur de l’information…
M-A. Méliyi : Exactement. Il faut savoir faire de la contre-programmation quand on ne sait pas rivaliser sur des rendez-vous très précis, et être dans l’air du temps avec une grille quasiment 100% politique.
Ecoutez-l’interview avec Marie-Aline Méliyi ci-dessous : (à partir de 11’40 »)
Merci à Marie-Aline Méliyi pour avoir accepté cet entretien, réalisé par Maxime Martinez et Elise Da Silva pour « Fréquence Médias », l’émission médias de la radio des étudiants de Sciences Po.
Crédits images : LCI / Marie-Aline Méliyi (Twitter)
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